Protocole de traitement médical renforcé des lombalgies et sciatiques aiguës
Bilan clinique et examens complémentaires utiles
1. Le bilan clinique
Le bilan clinique est très important, car c'est lui qui guidera l'interprétation des examens complémentaires et l'orientation du traitement. Donner un avis au regard des images, sans avoir examiné le patient n'a pas de sens !
Le bilan clinique donne des informations sur :
- le lieu de la lésion qui fait souffrir : c'est pourquoi le médecin note avec soin le trajet de la douleur et certains détails d'examen, comme la présence ou non des réflexes.
- la nature de la lésion. Par exemple, une douleur impulsive à la toux évoque une hernie discale, une douleur au bout d'un certain temps de marche fait penser à un rétrécissement du canal vertébral, une douleur à prédominance nocturne fait rechercher plus attentivement une cause autre que mécanique.
- l'intensité des douleurs : elle est évaluée subjectivement avec une petite réglette (EVA) et objectivement avec la distance doigt-sol et le signe de Lasègue (mise en tension du nerf sciatique par l'élévation de la jambe tendue). Il est important de séparer les douleurs lombaires, qui relèvent très rarement de la chirurgie et les douleurs sciatiques, qui peuvent être une indication d'infiltration épidurale, voire de traitement chirurgical. Ces paramètres serviront au suivi évolutif des douleurs.
- une complication neurologique déficitaire :
- La perte de force musculaire peut être partielle (parésie) ou totale (paralysie).
- Les atteintes L5 donnent une paralysie des releveurs du pied (impossibilité de se mettre sur les talons, accrochage des obstacles, pied tombant avec nécessité d'élever le genou pour passer le pas - c'est le "steppage").
- Les atteintes S1 donnent une paralysie du triceps (muscle du mollet), avec impossibilité de se mettre sur la pointe du pied en appui unipodal (sur une jambe), perte de force à la montée des escaliers, parfois gène au niveau du genou. Le réflexe achilléen est aboli.
- Les atteintes L4 et au dessus donnent une faiblesse, souvent partielle, et une atrophie du quadriceps (muscle antérieur de la cuisse) et une abolition du réflexe rotulien.
- La perte de sensibilité dans une partie du membre inférieur a une grande valeur topographique, mais n'est pas considérée comme un signe de gravité, au sens chirurgical du terme (pas d'indication à opérer). Il faut cependant s'assurer qu'il n'y a pas une vraie paralysie associée.
- La perte de la sensibilité du périnée et la perte du contrôle des urines, parfois des selles : c'est le SYNDROME DE LA QUEUE DE CHEVAL,complication redoutable (heureusement rare), risque d'être définitive, indication chirurgicale d'extrême urgence dès que l'on constate son apparition +++ Tout trouble de cette nature doit être immédiatement signalé au médecin !
- La perte de force musculaire peut être partielle (parésie) ou totale (paralysie).
2. Les examens d'imagerie
Les examens d'imagerie ont pris une importance disproportionnée aux yeux du public. Ceci conduit non seulement à des dépenses inutiles, mais aussi à une mauvaise façon d'aborder les traitements.
En première intention, on peut très bien traiter un lumbago ou une sciatique sans faire d'imagerie, à moins qu'il y ait des signes d'alerte au bilan clinique. C'est au médecin d'en juger.
Les radios standard restent le premier examen à faire, si les douleurs ne sont pas rapidement soulagées par le traitement médical.
- Elles montrent la morphologie générale de la colonne et permettent d'objectiver une inégalité de longueur des membres inférieurs, une scoliose, un glissement vertébral (spondylolisthésis).
- On recherche aussi des signes de pathologie plus grave (tumeur, infection). On regarde les articulations sacro-iliaques, à la recherche de signes de maladie inflammatoire et les hanches. Une cruralgie peut se confondre avec une douleur de hanche.
- Les hernies discales ne sont pas visibles sur les radios standard, mais peuvent donner des signes indirect, comme un pincement, plus ou moins caractéristique, d'un espace intervertébral. On peut également trouver des signes évocateurs d'un canal lombaire rétréci.
- Certaines anomalies spectaculaires, comme les "becs de perroquets" (exubérances osseuses liées à l'arthroses), n'ont pas grande valeur pour expliquer les douleurs.
Le scanner ou l'IRM sont demandés lorsque la lombosciatique dure depuis plus d'un mois.
- Le scanner montre des images en coupe, basées sur la densité des tissus soumis au passage des rayons X. L'os est très dense, le disque (blanc) et les racines ont une densité intermédiaire (gris), la graisse a une densité faible (gris sombre), l'air est transparent (noir). Les appareils modernes permettent de réaliser des coupes fines dans un temps très court, permettant des reconstructions dans tous les plans de l'espace.
- Normalement, les racines nerveuses doivent être de calibre régulier et entourées de graisse dans le canal vertébral et les trous de conjugaison (foramens). Les disques doivent avoir un contour régulier, ne débordant pas la projection du périmètre vertébral.
- Le scanner montre très bien les anomalies des éléments osseux : ostéophytes (exubérances osseuses arthrosiques), rétrécissement canalaire, fissuration ou fracture osseuse, tumeur osseuse.
- Il montre aussi les anomalies morphologiques du disque, en particulier les hernies discales, qui peuvent se situer dans le canal vertébral, le trou de conjugaison (hernies foraminales), voire à l'extérieur de celui-ci (hernies extra-foraminales).
- L'IRM est fondée sur la résonance magnétique des atomes d'hydrogène des tissus. On étudie deux séquences de réponse des atomes à l'application d'un champ magnétique puissant : la séquence T1 donne des images morphologiques ressemblant à celles du scanner. La séquence T2 fait apparaître en blanc les éléments riches en eau : le liquide céphalo-rachidien (c'est normal), les éléments inflammatoires, infectieux et certaines tumeurs. C'est donc un examen plus riche en informations, mais il est plus coûteux et les délais d'attente sont plus longs. L'examen est également plus long, quelques patients souffrent de claustrophobie dans l'appareil et certains objets implantés dans le corps sont des contre-indications (pace-maker, certaines prothèses, clips artériels, corps étrangers métalliques dans l'oeil...)
- Les disques sains ont un aspect gris clair en T2. Un aspect noir signe une déshydratation du disque correspondant à la dégénérescence discale. Celle-ci ne s'accompagne souvent d'aucun symptôme.
- Les hernies discales sont parfois mieux visualisées qu'au scanner.
- L'IRM est l'examen de choix lorsque l'on suspecte une inflammation, une infection ou une tumeur.
- L'injection de Gadolinium permet de "rehausser" certaines de ces images et d'apporter des arguments au diagnostic. Elle est également utilisée dans les sciatiques post-opératoires, pour faire la différence entre fibrose cicatricielle et récidive d'une hernie opérée.
D'autres examens sont plus rarement pratiqués. Leur demande relève du chirurgien ou d'un médecin spécialiste.
- La radiculographie est un examen ancien, mais qui reste intéressant devant une sciatique typique, invalidante, rebelle au traitement, mais dont la cause n'a pas été clairement démontrée par l'IRM. En effet, l'IRM est fait en position couchée et la radiculographie permet de prendre des clichés en position debout, ce qui peut dévoiler certaines hernies.
- Le myélo-scanner combine radiculographie et scanner : ceci permet une analyse fine des rapports entre les racines et les éléments environnants.
- Le disco-scanner consiste à injecter un produit de contraste dans le disque. Si le disque est bien en cause, ceci reproduit parfaitement la douleur et le produit de contraste vient opacifier la hernie discale, au contact de la racine nerveuse.
- La scintigraphie consiste à injecter un traceur radio-actif (à dose minime) et étudier le rayonnement émis à partir du squelette sur lequel le traceur se fixe. Cet examen intervient lorsque l'on suspecte ou que l'on veut éliminer des lésions tumorales, infectieuses ou inflammatoires. Elle a aussi un intérêt lorsque l'on suspecte une "fissure de fatigue" chez un sportif dont les vertèbres sont soumises à des contraintes répétitives. Une scintigraphie normale élimine formellement toute lésion osseuse, ce qui est particulièrement rassurant lorsque le patient a des antécédents cancéreux et des douleurs rebelles.
La biologie est demandée chaque fois que les douleurs n'ont pas un caractère typiquement mécanique, ou si les données d'examens laissent planer un doute. La numération formule sanguine, la mesure de la vitesse de sédimentation (VS) et le dosage de la Protéine C-réactive (CRP) permettent d'éliminer un syndrome inflammatoire ou infectieux, ainsi qu'une maladie du sang.
Tous ces examens servent donc à préciser la cause de la lombosciatique :
- Cause mécanique, comme une hernie discale, un rétrécissement canalaire.
- Cause non mécanique, inflammatoire, infectieuse ou tumorale.
Les anomalies visibles à l'imagerie ne doivent cependant pas prendre plus d'importance qu'elles n'en ont :
- Aucune image, même très spectaculaire, ne permet de prédire l'avenir.
- Il n'y a pas de parallélisme entre les images et l'intensité des douleurs.
- Les indications chirurgicales ne sont pas posées pour traiter une image, mais pour traiter un patient qui souffre d'une douleur invalidante ou d'une complication neurologique bien expliquée par une image de lésion curable.
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